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HISTOIRES

Le printemps selon Igor : un feuilleton radiophonique retrace l’un des plus grands succès à scandale de la musique

31 mai 2021
Le printemps selon Igor : un feuilleton radiophonique retrace l’un des plus grands succès à scandale de la musique
le compositeur Igor Stravinsky (1882 - 1971)

Souvent qualifié de « séisme musical », Le Sacre du Printemps, ballet d’Igor Stravinsky créé à Paris en mai 1913, bouleversa le monde de la musique comme peu d’œuvres ne l’avaient fait auparavant ou ne l’ont fait depuis. Aujourd’hui, à l’occasion du 50e anniversaire de la mort du compositeur, la chaîne belge Musiq'3 met à la disposition de la communauté de l’UER un feuilleton en français comptant cinq épisodes de 30 minutes, intitulé « Le Printemps selon Igor ». Outre le célèbre pianiste français Alexandre Tharaud, qui incarne le légendaire danseur Vaslav Nijinsky, la distribution comprend Thierry Hellin dans le rôle d’Igor Stravinsky et Stéphanie Van Vyve en Elisa Miller. Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter la page Web du projet.

Igor Stravinsky nous fait entrer dans le processus créatif du Sacre du Printemps, dont l’originalité provoqua l’un des plus grands scandales de l’histoire de la musique. Avec lui, nous sommes transporté.e.s par la fièvre des Ballets russes dans la vision de Serge Diaghilev, déterminé à révolutionner la danse classique. Au fil du récit, Vaslav Nijinsky, dont l’art subjugua le public du monde entier, nous rapporte quelques pages de son journal. Nous croisons aussi Gabrielle Chanel, dite Coco Chanel, en pleine conquête de Paris, tandis qu’elle vit une ardente histoire d’amour avec Igor Stravinsky.

Axelle Thiry, auteure et productrice chez Musiq'3, explique comment elle a procédé pour nous faire vivre l’une des périodes les plus créatives et les plus captivantes de l’histoire de la musique.

Q: Alexandre Tharaud donne sa voix à Vaslav Nijinsky. Pourquoi avoir choisi un pianiste, et non un comédien ? Pourquoi votre choix s'est-il porté sur lui ? Quelle est la relation de la RTBF avec Alexandre Tharaud ?

AT: Le fait de proposer à Alexandre Tharaud de prêter sa voix à Vaslav Nijinsky a été une évidence. Je cherchais quelqu’un pour incarner ce danseur exceptionnel. Nijinsky apporte des sentiments très purs au feuilleton. J’écoutais des voix de comédiens… Mais un jour, alors que je roulais dans les champs et que je traversais un beau paysage couvert de neige, j’ai entendu une interview d’un pianiste à la radio. Je me suis immédiatement dit que c’était lui, que j’avais trouvé le Nijinsky du feuilleton. La voix était à la fois sensible et déterminée. C’était vibrant. Il y avait aussi une pureté qui convenait bien à Nijinsky.

J’ai attendu la fin de l’émission, et j’ai alors su que c’était celle d’Alexandre Tharaud.  Il a été très accueillant avec ce projet. Il a incarné Vaslav Nijinsky avec beaucoup de sincérité. Alexandre m’a ensuite proposé de faire d’autres feuilletons. Au cours de l’un d’eux, il incarne Frédéric Chopin, et récemment, il prête sa voix à Maurice Ravel dans une autre série radio. En plus, il s’implique beaucoup dans ces projets. C’est grâce à lui que Dominique Blanc, de la Comédie française, prête sa voix à George Sand. Il enregistre aussi de la musique  spécifiquement pour certains feuilletons. Cela a été le cas pour ceux où il incarne Frédéric Chopin et  Maurice Ravel. Il cherche parfois même un piano qui a une sonorité qui convient à la série et on se donne rendez-vous dans Paris pour enregistrer des passages qui suivent les épisodes. Il trouve aussi le moyen de participer aux conférences de presse, même au milieu d’une journée de répétitions… En plus d’être si talentueux, Alexandre est d’une grande générosité.


Interview, 1e partie

Q: En tant que musicien, Alexandre Tharaud nourrit un rapport à Stravinsky qui est sans doute différent des deux autres personnes qui prêtent leur voix aux personnages. Comment s'est déroulé l'enregistrement ? Quel a été son rapport à ce travail ?

AT: L’enregistrement s’est très bien passé. Alexandre connaît l’univers artistique et musical de l’intérieur. Cela apporte de la profondeur et de la vérité à ses interprétations. Il a beaucoup voyagé dans le monde des compositeurs par leur création. C’est un univers intime et d’une richesse infinie. On dirait qu’il porte tous ces voyages, tous ces horizons en lui et qu’il les amène en studio. Cela donne beaucoup de vérité à ses interprétations. Dès qu’on a ouvert le micro, Alexandre a dit les phrases que Vaslav Nijinsky avait écrites comme si elles étaient de lui.  Ce qu’il disait, il semblait le vivre. C’est peut-être cela, le plus important : que la personne qui lit ressente les choses, avec sincérité, et en laissant toute sa sensibilité s’exprimer. Cela permet à celles et ceux qui écoutent de tout ressentir aussi.


Interview, 2e partie

Q: Le personnage d'Elisa Miller est fictif. Pourquoi et comment l'avez-vous imaginé ?

AT: Je l’ai créé pour apporter aussi une sensibilité féminine au feuilleton et pour offrir un regard extérieur sur les événements qui se déroulent. Elle me permet de voir la scène d’un autre angle. Par exemple, on vit d’abord le scandale de la création du Sacre du printemps du point de vue d’Igor Stravinsky et ensuite, on revit la soirée d’un point de vue extérieur, celui de cette journaliste. Cela permet de montrer comment un même événement peut être vécu très différemment. J’ai imaginé qu’elle était journaliste pour pouvoir raconter les événements et pour faire avancer l’action. J’ai eu envie qu’elle éprouve de l’admiration et de la sympathie pour Igor Stravinsky parce que, finalement, l’ingrédient essentiel du feuilleton vient des sentiments, que ce soit pour Igor Stravinsky, Vaslav Nijinsky, ou pour ce personnage fictif d’Elisa Miller.


Interview, 3e partie

Q: Qu'est-ce qui a motivé le choix des extraits musicaux, hormis le répertoire de Stravinsky évidemment?

AT: Le choix des extraits musicaux a été tout d’abord dicté par l’histoire. Quand on évoque la création d’œuvres, ce sont celles-là que l’on entend, par exemple pour le Prélude à l’après-midi d’un faune de Claude Debussy. Il s’agit aussi de trouver le passage ou le morceau de musique qui va s’accorder avec le climat qui est décrit. Par exemple, quand Igor Stravinsky est dans un train avec un taureau, je cherche une musique qui va créer le plus grand suspense possible. Ou encore, quand Vaslav Nijinsky s’élance dans les airs devant le public médusé, j’essaie de trouver un passage éblouissant. A l’inverse, l’Elégie va bien accompagner un moment un peu contemplatif, un peu nostalgique. En ce qui concerne Vaslav Nijinsky, il est associé au Carnaval de Robert Schumann. Il a dansé sur cette musique et elle accompagne toutes ses apparitions dans le feuilleton. L’infinie tendresse de Robert Schumann s’accorde bien avec sa sensibilité. Schumann était aussi un poète et un écrivain de grand talent. On a l’impression que sa musique raconte une histoire et elle accompagne à merveille la voix de Nijinsky qui se confie. L’idée était que Nijinsky puisse faire irruption dans le feuilleton sur les notes de Schumann, en apportant des sentiments très purs.

Je suis très reconnaissante à ceux qui ont prêté leur voix au feuilleton de l’avoir fait avec tant de talent. Merci à Thierry Hellin, Alexandre Tharaud et Stéphanie Van Vyve. Merci aussi à Thierry Lequeux qui signe la réalisation.


Interview, 4e partie

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Contact


Mireia Pacareu Fauquier

Éditrice, Musique et Projets en direct, Musique classique

pacareu@ebu.ch

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